Nikolaï Rimski-Korsakov (1844-1908)
Des débuts contrariés
Nikolaï Andreïevitch Rimski-Korsakov naît le 18 mars 1844 à Tikhvineprès de la cité de Novgorod située sur le territoire de l’actuelle Russie dans un milieu aristocratique de l’Empire russe. Élevé à la campagne, il connaît très jeune les chants folkloriques qui nourriront son œuvre. Il commence la musique dès l’âge de quatre ans, mais ce goût n’est pas considéré avec sérieux par ses parents. Ceux-ci l’inscrivent donc à l’école de mathématiques et de navigation navale de Saint-Pétersbourg : Rimski-Korsakov devient officier de marine. Il ne cesse cependant jamais de pratiquer la musique, prenant des cours de piano et fréquentant assidûment l’opéra. Il prend même quelques cours de composition et a la chance, à dix-sept ans, d’être présenté à Balakirevcompositeur russe (1837-1910), le chef de file du futur groupe des CinqCe groupe sera constitué des compositeurs Nikolaï Rimski-Korsakov, Alexandre Borodine, Modeste Moussorgski et César Cui, réunis autour de son fondateur, Mili Balakirev.. Celui-ci lui conseille de profiter de ses voyages en mer pour enrichir ses connaissances, au contact d’autres cultures. C’est lors de missions en mer que Rimski-Korsakov termine sa Symphonie n° 1, que Balakirev donne en concert en 1865, révélant ainsi au public le jeune compositeur.
L’essor d’un compositeur
Conforté par ce succès, Rimski-Korsakov consacre de plus en plus de temps à la composition. En 1866 (il a alors 22 ans), il donne sa démission de la marine pour se consacrer entièrement à la composition. Il fréquente avec assiduité des compositeurs tels que Borodine et Moussorgski (appartenant comme lui au groupe des Cinq), et travaille d’arrache-pied avec ce dernier : les deux jeunes compositeurs échangent leurs idées, l’un écrivant parfois une partie de la composition de l’autre. Dès cette époque, Rimski-Korsakov tisse également des liens avec un autre compositeur russe, Tchaïkovski.
Professeur au conservatoire
En 1871, bien qu’autodidacte, il a la chance de devenir professeur d’orchestration et de composition au conservatoire de Saint-Pétersbourg, ce qui l’oblige à se perfectionner très rapidement, afin de répondre au niveau solide réclamé par ses élèvesAu début mes élèves n’imaginaient, ni ne pouvaient se rendre compte de mon ignorance.
. Tchaïkovski lui donne des « cours de rattrapage » en techniques d’écriture musicale, et cette nomination lui permet finalement de se perfectionner de manière spectaculaire. Il est enfin reconnu comme un grand musicien : j’étais en extase, et mes amis également
, dira-t-il. Cependant, son intérêt pour les techniques d’écriture musicale du passétel le contrepoint, pratiqué par Johann Sebastian Bach provoque l’incompréhension de ses amis du groupe des Cinq, qui le rejettent alors. Seul Tchaïkovski, influencé par l’Occident, le soutient dans cette voie.
Le retour au folklore
Vers 1874, Rimski-Korsakov se tourne heureusement à nouveau vers le folklore, qu’il connaît si bien depuis son enfance. Il publie une grande quantité de mélodiesdans lesquelles puisera Stravinski pour L'Oiseau de feu accompagnées au piano. Ce travail sur les mélodies traditionnelles russes lui permet de renouveler son inspiration : il compose ainsi un opéra, La Nuit de mai (1878), qui réalise une synthèse de ses recherches récentes. Cependant, l'inspiration semble toujours lui manquer et il préfère se consacrer aux œuvres de ses collègues : il termine Le Prince Igor que Borodine a laissé inachevé à sa mort, et travaille à l’orchestration d’œuvres de Moussorgski.
Un succès éclatant
En 1886, il crée un cycle de « Concerts symphoniques russes » : il y dirige la musique de nombreux compositeurs mais y produit aussi sa propre musique. C’est une grande période créatrice pour Rimski-Korsakov : il compose alors ses œuvres les plus célèbres, telles que le Capriccio espagnol (1887), Shéhérazade (1888), La Grande Pâque russe (1888), etc. Entre 1893 et 1908, il se tourne cette fois vers l’opéra et en écrit plus d’une dizaine, dont le plus célèbre est le Coq d’or opéra qui marquera beaucoup Stravinski pour L’Oiseau de feu (1906-1907). Il meurt le 21 juin 1908.
L’œuvre
Rimski-Korsakov laisse plus de quinze opéras, dont Les Contes du tsar Saltan (1900) d’où est extrait le célèbre Vol du bourdon, mais aussi cinq poèmes symphoniques, quatre symphonies, trois concertos, deux quatuors, trois cantates, quatre recueils pour piano, des mélodies et de la musique religieuse, etc. À la disparition du groupe des Cinq, il occupe un rôle important auprès de jeunes compositeurs, tels Glazounov et Stravinski, qu’il conseille et à qui il enseigne. Son influence est ainsi grande auprès de la jeune génération de compositeurs russes. Son goût pour l’orchestration recherchée et coloréecomme dans Shéhérazade ou le Capriccio espagnol impressionna hors de Russie aussi bien Richard Strauss que Maurice Ravel.
Auteur : Bruno Guilois