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La musique à Vienne au temps de Mozart
Une vie musicale intense…
Au moment où Mozart quitte son employeurLe prince-archevêque Colloredo à Salzbourg pour venir habiter Vienne, la ville est le théâtre d’une intense vie culturelle et artistique, protégée par le despotisme éclairé de l’empereur Joseph IIqui règne de 1741 à 1790. Dans le domaine musical, la cour impériale a depuis de nombreuses années donné l’exemple à la noblesse, qui tâche de l’imiter en produisant dans ses palais les compositions des artistes à la dernière mode. La bourgeoisie n’est de son côté pas en reste : la musique se pratique dans ses salons, en privé et en public, et il n’est pas rare que les auditeurs musiciens d’un jour s’emparent eux-mêmes d’un instrument pour participer au concert. De manière générale, à la fin du XVIIIe siècle à Vienne, la musique fait véritablement partie de l’éducation cultivée de « l’honnête homme ». Bien avant l’arrivée de Mozart, les musiciens ont par ailleurs pris l’habitude de donner des concerts réguliers dans la capitale autrichienne, et Mozart lui-même suit cette voie quand il s’y installe, en finançant l’organisation de ses concerts par souscriptionPour un concert en mai 1782, Mozart demande une souscription de deux ducats par personne, avec un orchestre d’amateurs.. Reflet d’une intense vie musicale, stimulée par une pratique instrumentale ou vocale largement répandue dans les diverses couches de la société, l’édition musicale est florissante. Vienne devient ainsi, à partir des années 1770, la première ville européenne pour l’édition de la musique, ce qui contribue à faire connaître à l’étranger des compositeurs comme Joseph Haydn (1732-1809).
… et une vive concurrence entre compositeurs
Mozart rencontre lui-même une rude concurrence lors de son arrivée à Vienne, et il doit souvent lutter avec certains de ses confrères pour obtenir de grandes commandes. Les places les plus prestigieuses sont en effet occupées à la cour par d’autres artistes, tel le célèbre Antonio Salieriqui a pour élève Beethoven, Schubert et Liszt (1750-1825), compositeur de la cour et chef d’orchestre de l’Opéra italien. La légende qui accuse – à tort – ce dernier d’avoir empoisonné Mozart à la fin de sa vie est révélatrice de la forte rivalité qui pouvait parfois exister alors. Certains « duels musicaux » – mais amicaux – sont parfois organisés entre deux artistes de talent. Mozart doit ainsi prouver en 1782, devant l’empereur, et sur un piano-forte abîmé, qu’il est au moins l’égal du compositeur Muzio Clementi (1752-1832). La subsistance matérielle des musiciens concurrents – et surtout des compositeurs indépendants – n’est pas toujours satisfaisante dans ce contexte. En quittant son poste de Salzbourg, Mozart doit par exemple renoncer à tout salaire régulier, n’ayant plus d’employeur fixe. Les compositeurs sont principalement à l’affût de commandes prestigieuses et bien rémunérées. Si la commande d’un opéra par l’empereur est espérée par tous, ce sont souvent les riches amateurs de musique qui permettent aux compositeurs de vivre de leur art. Le baron Gottfried Bernhard van Swieten (1733-1803) est l’exemple même du mécène fortuné et cultivé qui fait jouer dans ses salons des œuvres de compositeurs contemporains et ancienscomme Johann Sebastian Bach ou Georg Friedrich Haendel mais passe aussi régulièrement commande d’œuvres à Mozart.
L’essentiel
- À la fin du XVIIIe siècle, Vienne est un intense foyer d’activité musicale.
- La pratique musicale fait partie de toute bonne éducation.
- La rivalité est souvent grande entre les compositeurs qui luttent pour obtenir des commandes d’opéras.
- La subsistance des compositeurs indépendants, tel Mozart, n’est pas toujours assurée.
Auteur : Bruno Guilois